RE-HAVRE
Le Havre De l’avant-garde à l’héritage : quelle(s) transition(s) ?
Tout à la fois point de départ et point d’arrivée, Le Havre n’en finit jamais vraiment avec les « re », préfixe de la réitération comme du retour, et suffixe d’une ville qui se révèle au miroir des grands mouvements politiques et sociologiques de notre pays, destination id(h)éale pour étudier la multiplicité des transitions auxquelles les villes font face, et le logement avec elles.
La Cîté océane a su profiter des atouts de sa situation littorale à l’estuaire de la Seine. Entre avant-poste de l’Atlantique et Seine-aval, l’interface terre-mer-fleuve a scellé le destin du Havre. Avec sa Porte Océane et son étonnante skyline, Le Havre a incarné pendant les Trente Glorieuses la petite « Manhattan française » d’où partait vers New York le paquebot « France ». Aujourd’hui, ce sont quelque 230 000 tonnes de marchandises qui transitent chaque jour dans son port, dont la stratégie immobilière est un levier de transition terre/mer.
Détruit à 82% par la Seconde Guerre mondiale, laissant 80 000 personnes sans abri, le centre-ville du Havre incarne les transitions d’époques. Courageusement reconstruit entre 1945 et 1964, sous la houlette de l’architecte en chef Auguste Perret, son triangle monumental, l’austère rigueur de son plan, son béton armé et ses trames de 6,24m ont fini par conquérir le cœur des Havrais et l’attention du monde entier, ce dont témoigne son classement au Patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco en 2005. Cette reconstrution laissait pourtant 40 000 anciens habitants du centre-ville dans des logements de fortune, une situation à l’origine d’une politique de densification de la ville haute, et de mobilisation du diffus.
Le Havre compte aujourd’hui 168 290 habitants. La ville normande incarne plus prosaïquement les mouvements ordinaires qui frappent les villes moyennes françaises : les flux et reflux migratoires et démographiques, le vieillissement des bâtiments dont témoigne un grand nombre de lieux vacants dans ses faubourgs. L’heure est à la réinvention, à la rénovation et la recréation. Pour réhabiliter « le Perret » et s’inscrire dans son périmètre classé ; pour améliorer l’ancien et transformer des quartiers nécessitant une recomposition parcellaire ; pour potentialiser l’Axe Seine enfin, et réinventer le rapport à la mer de la ville-port.
Les contextes politiques ont changé. Comme la gouvernance et la manière d’administrer un territoire. L’histoire de la ville ne s’écrit plus dans la seule tête d’un maire ou d’un architecte mais à plusieurs, via une intercommunalité, des dynamiques régionales et portuaires partagées, et des processus participatifs. Se réinventer est bien le destin du Havre. Alors, de l’avant-garde à l’héritage, quelle(s) transition(s) ? Ce voyage d’études de l’Institut des Hautes Études pour l’Action dans le Logement est conçu comme une enquête sur les stratégies pour transformer un patrimoine culturel, industriel et constructif en un tremplin pour rebondir. Et re-Havre !